Le Congrès américain reconnaît le génocide arménien et fâche la Turquie
le jeudi 12 décembre 2019 //armenews.com//
Le Congrès américain reconnaît le génocide arménien et fâche la Turquie
Washington, 12 déc 2019 (AFP) – Le Congrès des Etats-Unis a formellement
reconnu jeudi le « génocide arménien » lors d’un vote symbolique qui a encore
renforcé le courroux de la Turquie à un moment crucial pour l’avenir des
relations entre Washington et Ankara.
Après la Chambre des représentants à une écrasante majorité fin octobre, le
Sénat a adopté à l’unanimité une résolution pour “commémorer le génocide
arménien en le reconnaissant officiellement”.
Il appelle aussi à “rejeter les tentatives (…) d’associer le gouvernement
américain à la négation du génocide arménien”, dans ce texte promu par des
sénateurs des deux bords politiques mais qui avait été bloqué à plusieurs
reprises par des alliés républicains de Donald Trump.
“Je suis heureux que cette résolution ait été adoptée à une époque où il y
a encore des survivants du génocide”, a déclaré dans l’hémicycle l’un de ses
auteurs, le sénateur démocrate Bob Menendez, avant d’être saisi par l’émotion
et de s’efforcer de contenir ses larmes.
Comme en octobre, le Premier ministre arménien Nikol Pachinian a salué “une
victoire pour la justice et la vérité« . »Au nom des Arméniens, j’exprime ma
gratitude au Congrès américain”, a-t-il tweeté.
Et comme en octobre, la Turquie a dénoncé sans tarder un vote qui “met en
péril l’avenir des relations” turco-américaines.
– Appel à Trump –
Bien que ces résolutions ne soient pas contraignantes, des parlementaires
exhortent le locataire de la Maison Blanche à leur emboîter le pas.
“Le Congrès est désormais uni pour dire la vérité au sujet du génocide. Il
est temps que le président en fasse autant”, a lancé sur Twitter l’élu
démocrate Adam Schiff.
Au début de son mandat, Donald Trump avait qualifié le massacre des
Arméniens en 1915 d’« une des pires atrocités de masse du XXe siècle », se
gardant d’employer le terme de « génocide ».
Le génocide arménien est reconnu par une trentaine de pays et la communauté
des historiens. Selon les estimations, entre 1,2 million et 1,5 million
d’Arméniens ont été tués pendant la Première Guerre mondiale par les troupes
de l’Empire ottoman, alors allié à Allemagne et à l’Autriche-Hongrie.
Mais Ankara refuse l’utilisation du terme « génocide », évoquant des
massacres réciproques sur fond de guerre civile et de famine ayant fait des
centaines de milliers de morts dans les deux camps.
Or, les relations entre les Etats-Unis et la Turquie, alliés au sein de
l’Otan, traversent une période de fortes turbulences, et sont à la croisée des
chemins.
A Washington, l’immense majorité de la classe politique ne décolère pas
face à ce qu’elle considère être des outrances du président turc Recep Tayyip
Erdogan. Surtout depuis que l’armée turque a acheté des systèmes russes de
défense antiaérienne jugés incompatibles avec son adhésion à l’Alliance
atlantique, puis qu’elle a lancé en octobre une offensive en Syrie contre les
forces kurdes alliées des Occidentaux dans la guerre antijihadistes.
– Sanctions anti-Turquie en vue –
Nouveau signe d’une rupture inédite, la commission des Affaires étrangères
du Sénat américain a adopté mercredi une proposition de loi soutenue par les
démocrates comme par les républicains qui prévoit des sanctions draconiennes
contre la Turquie et ses dirigeants.
S’il passe les prochaines étapes, ce texte, encore plus que celui sur le
génocide arménien, risque de placer Donald Trump en porte-à-faux.
Le 45e président des Etats-Unis, en effet, met lui volontiers l’accent sur
son « amitié » avec son homologue turc, qu’il a reçu en grande pompe il y a un
mois dans le Bureau ovale.
L’ex-homme d’affaires new-yorkais a même été accusé, jusque dans son propre
camp, d’avoir « abandonné » ses alliés kurdes en laissant le champ libre à
l’attaque turque en Syrie.
Son ex-émissaire pour la lutte contre le groupe jihadiste Etat islamique,
Brett McGurk, a relevé jeudi sur Twitter qu’un mois après la rencontre
controversée à la Maison Blanche, Recep Tayyip Erdogan s’était encore
davantage éloigné des Occidentaux pour se rapprocher de la Russie.
“Voilà les conséquences quand Trump fait plaisir à Erdogan sans demander
absolument rien en échange”, a dit celui qui est devenu un féroce détracteur
de la politique étrangère du président américain. “La relation de Trump avec
Erdogan a sapé tout effort sérieux pour pousser la Turquie à être plus
constructive.”
par Ara Toranian le jeudi 12 décembre 2019
© armenews.com 2019