Macron : nous ne lâcherons pas les Arméniennes et les Arméniens
le mercredi 12 octobre 2022 – POLITIQUE INTERNATIONALE.
Macron : nous ne lâcherons pas les Arméniennes et les Arméniens
Le président de la République, qui répondait mercredi 12 octobre à 20h20 aux questions de Caroline Roux lors de la première édition de « l’Evénement » sur France 2 a évoqué l’agression de l’Azerbaïdjan contre l’Arménie. Voici la retranscription de l’intégralité de ses propos qui réaffirment le soutien à l’Arménie, la condamnation de l’agression azerbaïdjanaise, la duplicité de la Russie avec le soutien turc.
Caroline Roux : Monsieur le président Sylvain Tesson, écrivain et voyageur qui revient d’Arménie vous a écrit : « L’Arménie n’est pas un pays comme les autres. Sa voix, son territoire, sa culture, son chagrin, sa terre en font le poste avancé de l’Europe. M. Le président, les Arméniens vous appellent. La France prendra-t-elle le risque d’entrainer ses alliés et de se lever pour l’Arménie ?
Emmanuel Macron : D’abord Sylvain Tesson a raison de le dire, l’Arménie est un pays avec lequel nous avons un lien unique. Parce que l’Arménie s’est toujours battue pour une forme d’universel dans cette région, de tolérance, d’esprit de paix…
Caroline Roux : et on les laisse tomber…
Emmanuel Macron : non ce n’est pas vrai du tout. Je peux vous le dire, j’y ai passé la nuit il y a quelques jours. Je peux vous dire qu’on ne les laisse pas tomber. L’Arménie c’est un peuple auprès duquel nous étions. Notre marine a aidé ce peuple il y a un peu plus d’un siècle quand le génocide a eu lieu là-bas. Nous nous sommes battus contre les négationnistes, les révisionnistes du génocide qu’a subi l’Arménie. Et beaucoup de familles sont venues en France, beaucoup de nos compatriotes ont des origines arméniennes et nous écoutent. Aujourd’hui l’Arménie est dans quelle situation ? Il y a deux ans elle a subi une guerre dans le Haut-Karabakh que vous voyez qui était un territoire qui n’était pas reconnu sur le plan international, il y avait là-dessus une controverse, mais l’Arménie était donc au Haut-Karabakh, dans ce pays qui était au cœur de l’Azerbaïdjan. L’Azerbaïdjan a lancé une guerre terrible, avec beaucoup de morts et des scènes atroces, et elle a repris ce territoire. Au mois de septembre, l’Azerbaïdjan a lancé le long de la frontière plusieurs offensives, en particulier, de manière évidente, on le voit sur cette carte, pour pouvoir vraisemblablement faire un corridor d’un bout à l’autre de son territoire.
Caroline Roux : que peut-on faire ?
Emmanuel Macron : nous l’avons clairement condamné. J’ai fait tout de suite un appel au président Aliev, président de l’Azerbaïdjan et au Premier ministre Pachinian d’Arménie, qui est venue à Paris quelques jours plus tard. La France fait partie des puissances de médiation. Et donc, d’abord j’ai souhaité que ces deux pays puissent être invités à Prague, lors de la Communauté Politique Européenne. Ce qui a permis par parenthèse pour la première fois dans l’histoire récente à un Premier ministre arménien de rencontrer un président turc. Pour vous dire l’importance de cette réunion de Prague. Et surtout, pendant plusieurs heures, avec le président du Conseil européen nous avons réuni les deux protagonistes, c’est-à-dire le Premier ministre arménien et le président azerbaïdjanais.Et nous avons décidé, d’abord, que les deux parties s’engageaient à reconnaitre les frontières de 1991. Cette ligne blanche. Qu’ils acceptent le principe d’une mission européenne qui part ces jours-ci et qui va donc aller sur le terrain constater les infractions à venir pour permettre ensuite à la communauté internationale de se prononcer et de restaurer l’ordre et le respect des frontières. Et vous voyez, tout est lié. Sur cette frontière, qu’est-ce qu’il se passe depuis deux ans ? Vous avez 5000 soldats russes qui sont là. Et qui sont prétendument des gardes du corps. Dans ce conflit il y a un conflit sous-jacent. La Russie a utilisé ce conflit qui datait depuis plusieurs décennies et elle s’est immiscée dans ce conflit, elle a manifestement joué le jeu de l’Azerbaïdjan, avec une complicité turque, et elle est revenue là pour affaiblir l’Arménie qui pourtant naguère était un pays dont elle était proche. Et vous voyez, ce qu’il se passe là, c’est une manœuvre de déstabilisation de la Russie, qui dans le Caucase cherche à créer le désordre pour tous nous affaiblir et nous diviser. Donc, pour le dire simplement, la France est là, présente, puissance de médiation. Votre serviteur a au nom du pays mené cette négociation pendant la nuit de jeudi à vendredi dernier. Et nous ne lâcherons pas les Arméniennes et les Arméniens.
Caroline Roux : il n’y a pas une forme de tolérance vis-à-vis de l’Azerbaïdjan parce que nous avons scellé un accord sur le gaz ?
Emmanuel Macron : la France n’achète pas de gaz là-bas. Et il n’y a pas d’accord.
Caroline Roux : l’Europe oui ?
Emmanuel Macron : Plusieurs pays européens ont des accords gaziers, bien sûr. Mais je vais vous dire, en ce qui concerne la France et en ce qui concerne la voix de l’Europe, et je vous le dis les yeux dans les yeux, et pour tous nos compatriotes, nos valeurs et nos principes ne s’achètent pas, ni à coups de gaz, ni à coups de pétrole.