Le Bundestag allemand a finalement eu son débat sur le génocide arménien jeudi et a décidé de reporter le vote pour le nouveau projet de loi sur le génocide arménien proposé par l’Alliance 90 / Les Verts. La coalition au pouvoir a argué que ce n’était pas le bon moment pour adopter le projet de loi et a proposé de poursuivre les discussions dans les prochaines semaines pour préparer un nouveau document qui devrait être finalisé le 24 avril 2016.
Cem Ozdemir, Président de l’Alliance 90 / Les Verts a accepté de retirer son projet de loi, à condition que le nouveau document commun qui sera présenté aux votes au plus tard le 24 avril mentionne clairement les événements de 1915 comme un génocide, reconnaisse le rôle de l’Allemagne dans le massacre et contribue à la normalisation des relations entre les Arméniens et les Turcs.
La question a été portée à l’ordre du jour par l’Alliance 90 / Les Verts, c’est-à-dire les Verts allemands qui a toujours voulu que les événements de 1915 soient désignés sous le terme de « génocide ».
Leur leader d’origine turque, Cem Ozdemir a déclaré devant le Bundestag : « les autorités ne prennent pas de position commune sur la question de peur d’irriter Erdogan. « Je ne comprends pas pourquoi nous ne pouvons pas voter ce projet de loi. Nous devons le faire cela pour la simple et bonne raison d’éclairer notre conscience “, a-t-il dit.
« La Turquie déforme sa propre histoire, alors que notre objectif est d’établir la vérité. Un message clair de la part de l’Allemagne pourrait changer beaucoup de choses », a déclaré Ozdemir, qui lancé cet appel à la chancelière : “ ne sacrifions l’estime de soi avec des partenaires difficiles“.
Klaus Brähmig de la CDU / CSU a dit, à son tour, que « les autorités turques actuelles ne sont pas responsables de leurs ancêtres, mais peuvent prendre des mesures pour améliorer les relations avec l’Arménie.“
« Aujourd’hui, nous n’avons besoin d’aucun rapport critiquant la Turquie. Nous avons au contraire besoin de mesures qui contribueront au règlement de la question des migrants. A en juger par notre propre histoire, nous pouvons dire que peu importe comment nous invitons la Turquie activement à évaluer son propre passé, son peuple doit être prêt pour cela. Et cela aura, quand il n’y a plus de pression de l’extérieur. Par conséquent, nous ne pouvons pas voter en faveur de cette résolution “, a-t-il dit.
“Nous devons nous respecter et de ne pas embrasser les yeux de la Turquie à chaque fois. Vous avez demandé du temps, et nous vous l’a donné en abondance », a dit Ozdemir à la coalition. « La Turquie parle de société civilisée, mais persécute les journalistes qui osent parler ouvertement,“ a-t-il ajouté.
“Si nous parvenons vraiment à travailler sur un nouveau document avant le 24 avril sur la base des trois points susmentionnés, nous vous disons : « Nous sommes avec vous ». Mais avec le temps, vous trouvez d’autres obstacles », a craint le Président du Parti des Verts.
Erika Steinbach (CDU), qui était absente pour cause de maladie lors du débat parlementaire, a déclaré : « Je suis toujours d’avis que l’on doit appeler un chat un chat. Il est scientifiquement incontesté que ceci est un génocide. Il serait à juste titre dénoncé que le Reich allemand a été impliqué dans ce génocide “.
Erika Steinbach a trouvé incompréhensible que son pays par respect pour la Turquie ne soit pas capable de dire que c’était un génocide. Elle s’est dit “consterné par la façon dont ce sujet a été traité“.
Le projet de loi débattu hier a noté que « le Bundestag allemand salue les victimes des déplacements forcés et le massacre des Arméniens, des Araméens, des Assyriens et des autres minorités chrétiennes de l’Empire ottoman, qui a commencé il y a 100 ans. Il a déploré les actions du gouvernement turc puis, l’anéantissement presque complet des Arméniens dans l’Empire ottoman.
La résolution a noté que « le sort des Arméniens se présente comme exemplaire dans l’histoire des exterminations de masse, du nettoyage ethnique, des déportations et oui, comme un génocide, qui a marqué le 20e siècle d’une terrible manière.“ Le président allemand Joachim Gauck avait utilisé les mêmes termes lors d’une cérémonie de commémoration à la veille du 100e anniversaire du génocide arménien.
Le projet de loi a déclaré qu’« une évaluation honnête de l’histoire est la base la plus importante pour la réconciliation ».
Le projet de loi a également évoqué le rôle de l’Allemagne dans le génocide arménien, en notant que “les autorités allemandes d’aujourd’hui sont tenues de contribuer à la reprise des relations arméno-turques, ouverture de la frontière commune.“
Contrairement à la résolution adoptée par le Bundestag en 2005, le projet de loi considère aujourd’hui clairement les événements décrits comme « génocide ».
En 2005, le parlement de l’Allemagne avait adopté une résolution reconnaissant le génocide arménien. Toutefois, dans la décision du Bundestag, le terme de génocide arménien avait été évité, pour être remplacé par celui de « massacres des Arméniens ». En mars 2015, le Président du Parlement allemand Norbert Lammert a déclaré : « ce qui est arrivé dans l’Empire ottoman pendant la Première Guerre mondiale devant le monde entier était un génocide. Et ce ne fut pas le dernier génocide du 20e siècle. “
Le 24 avril, avant la séance du Bundestag, Frank-Walter Steinmeier ministre des Affaires étrangères de l’Allemagne a annoncé qu’il soutenait ces députés, qui sont pour qualifier les massacres des Arméniens de « génocide ». Le 23 avril, lors de la cérémonie dans la cathédrale de Berlin dédié à la mémoire du génocide arménien, le président allemand Joachim Gauck a également utilisé le terme « génocide » dans son discours.
Tessa Hofmann spécialiste bien connu du génocide a estimé de son côté que les actions de l’Allemagne en ce qui concerne la résolution seront de même que celles en 1915. Bien que ce sujet est à l’ordre du jour du Parlement allemand, Hofmann doute fortement que le Bundestag accorde beaucoup d’attention à la résolution. Elle avait expliqué dans une interview à Armenpress qu’actuellement les relations entre la Turquie et l’Allemagne jouent un rôle crucial et l’accent est mis sur la crise des réfugiés.
“Dans cette situation, notre ministère des Affaires étrangères fera tout son possible pour ne pas perturber les relations avec Ankara – ce qui comparables à la situation de 1915, lorsque l’Allemagne officielle a sacrifié tous les critères humains et humanitaires pour le bien de l’alliance militaire ottomane-allemande. Ni le génocide perpétré par les ottomans, ni la lutte permanente contre les Kurdes en Turquie (avec tous ses « dommages collatéraux » à la population civile kurde) ne changeront cela, je crains.
Et les critiques de ces « vrais politiques » ne sont pas assez nombreuses et assez influentes pour inverser la tendance. Et même si la possibilité d’un débat parlementaire sur le génocide arménien est discutée jeudi prochain, il y a peu de chance que les Verts gagnent suffisamment de soutien au sein de la coalition au pouvoir qui rassemble les conservateurs et les sociaux-démocrates », a déclaré Tessa Hofmann.
L’Alliance 90 / Les Verts et leur coprésidents ont condamné à plusieurs reprises le génocide arménien, exhortant la Turquie à reconnaître les faits historiques et se réconcilier avec la réalité.
vendredi 26 février 2016,
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